La religieuse trappistine de Notre Dame des Gardes, près de Chemillé, au diocèse d’Angers, est morte en odeur de sainteté, vers 1828. Elle avait trouvé refuge au sein d’une respectable famille contre la fureur des tyrans de 1793, qui, après l’avoir chassée de sa communauté, la faisaient rechercher pour l’ajouter comme tant d’autres au nombre de leurs victimes.
Le règne de la Terreur ayant cessé, cette religieuse passa dans un autre département où elle fut appelée pour aider à fonder un établissement en faveur des pauvres infirmes. L’une de ses visions est relatée dans « Le Tableau des Trois Époques » (Paris, 1829). La plupart de ces visions se sont réalisées littéralement.
» Cependant je vis de grands troubles dans cette Église ; ils n’ont été terminés que par un Concile général… Je vis ensuite un nuage épais qui se sépara en deux, et au milieu une clarté si vive et si brillante que je me trouvais hors de moi-même. Je voulus me retirer, ne me croyant pas digne de voir cette lumière ravissante, mais je me sentis retenue par une main et j’entendis une voix me dire : « Ne crains point, cette lumière est la figure de l’Église catholique, apostolique et romaine, dont on ne doit jamais se séparer. Tu as vu que le nuage s’est séparé en deux, qu’une partie a disparu à droite et l’autre à gauche : la partie du côté droit marque ceux des schismatiques qui ne reviendront pas ; la partie du côté gauche, celle des hérétiques que l’Église rejette de son sein. Tu vois au bas du nuage un grand lambeau qui se sépare de la lumière et qui tombe en terre : ce sont les prêtres corrompus, indignes du saint ministère. Ils sont rejetés de la sainte lumière que la perversité de leur cœur a éteinte. Alors je ne vis plus que la lumière qui me parut s’étendre dans tout l’univers ».
En rendant compte d’une autre vision dans laquelle, la religieuse voyait deux personnages, elle entre dans les plus grands détails touchant les épreuves actuelles et le magnifique triomphe qui doit les suivre.
Voici son récit :
« Le jour des Rois 1820, je pris pour mon sujet d’oraison le bonheur de ceux qui suivent le flambeau de la foi, comme les Mages avaient suivi l’étoile, et le malheur de ceux qui vivent sans foi. Il était quatre heures du matin, je ne sais ce que devint mon oraison, ni mes facultés naturelles, je les perdis toutes.
Je me trouvai transportée dans un lieu si vaste, qu’il me parut renfermer tout l’univers. Je vis pour la seconde fois ces deux grands arbres dont j’ai déjà parlé, mais ils me parurent bien plus grands que la première fois ; ils avaient des branches d’une étendue immense, mais ces branches étaient penchées vers la terre et paraissaient demi-mortes. Cependant, malgré leur peu de vigueur, ces arbres s’agitaient d’une manière si rapide et si irrégulière qu’ils faisaient trembler ; ils paraissaient vouloir tout envahir.
J’entendis des voix nombreuses qui criaient d’un ton horrible, et dans ce moment, je me crus demi-morte. Mais j’eus encore plus grand’peur quand j’entendis bien distinctement par trois fois les mêmes voix qui disaient :
« Nous sommes vainqueurs, nous avons la victoire ! »
Au moment où les voix prononçaient ces paroles, tout d’un coup, je vis que le ciel devint une profonde nuit ; je n’avais jamais rien vu de si obscur. Cette obscurité fut accompagnée d’un tonnerre, ou plutôt il me semblait que le tonnerre venait à la fois des quatre parties de la terre.
Il m’est impossible de vous peindre quelle fut ma frayeur : le ciel devint tout en feu, il lançait de toute part des flèches enflammées ; il se faisait un bruit si terrible, qu’il paraissait annoncer la ruine entière du monde.
J’aperçus alors un gros nuage rouge couleur sang de bœuf ; ce nuage roulait de tous côtés et me donnait bien de l’inquiétude, ne sachant ce qu’il signifiait.
Cependant j’aperçus des multitudes d’hommes et de femmes qui avaient des figures à faire peur ; ils se livraient à toutes sortes de crimes ; ils vomissaient des blasphèmes horribles contre ce qu’il y a de plus sacré au ciel et sur la terre. J’en ressentis une si grande peine, que je l’éprouve encore en vous écrivant ceci !
Ce qui me surprit, ce fut de voir à la tête de ces malheureux quelques-uns de ceux qui par leur état doivent les porter au bien, et qui les poussaient au mal.
Il y en a un que je ne nommerai point, qui subira le même sort que les autres à cause de sa damnable philosophie ; le temps vous dira tout, quand ces crimes seront connus et punis.
Le tonnerre grondait toujours dans les airs d’une manière effrayante, lorsque j’entendis une voix qui me dit : « Ne crains point : mon courroux tombera sur ceux qui ont allumé ma colère » ; ils disparaîtront dans un moment.
Tout l’univers sera étonné d’apprendre la destruction de la plus belle, de la plus superbe ville ! je dis superbe par ses crimes, je l’ai en abomination!
Les deux arbres que tu vois, c’est elle qui les a enfantés ; leurs branches représentent toutes les nations qu’elle a empoisonnées par sa malheureuse philosophie qui répand partout l’impiété ; c’est cette maudite Babylone qui s’est enivrée du sang de mes saints ; elle veut encore le verser, et dans peu celui d’un prince…
Elle mettra le comble à ces terribles forfaits, et moi, je lui ferai boire le vin de ma colère ; tous les maux tomberont à la fois sur elle et dans un seul instant.
Je n’entendis plus la voix, mais un bruit effroyable ; le gros nuage se divisa en quatre parties qui tombèrent à la fois sur la grande ville, et dans un Instant, elle fut tout en feu. Les flammes qui la dévoraient s’élevèrent dans les airs, et de suite je ne vis plus rien, qu’une vaste terre noire comme du charbon.
Après tout cela, le ciel s’éclaircit et, d’une nuit affreuse, je vis le plus beau jour que j’eusse jamais vu. Un doux printemps se faisait sentir, et tout paraissait dans l’ordre le plus parfait. Je vis des personnes de toutes qualités, qui étaient en si grand nombre, que c’était comme une fourmilière ; je n’ai jamais vu de figures si contentes ; elles avaient, je ne sais quoi qui inspirait la joie ; elles se tenaient là toutes dans un profond respect, et un silence général régnait, quand j’aperçus une grande place, autour de laquelle toutes ces personnes me parurent réunies.
Au milieu de cette place, je vis une tige semblable à une belle pyramide, dont la cime paraissait s’élever jusqu’au ciel. Il y avait d’autres tiges tout autour de celle-là ; de distance en distance et comme par étages, elles étaient toutes garnies de feuilles d’un vert velouté et d’un brillant admirable ; entre ces feuilles, il y avait des fleurs, les unes d’un rouge éclatant, les autres d’une blancheur non pareille ; tout cela donnait un coup d’œil charmant.
Sur la cime de la principale tige était un gros globe qui me parut d’un or très pur, et une colombe, blanche comme la neige, voltigeait au-dessus. — J’admirais tout cela, lorsque j’entendis un chant si mélodieux, qu’il me semblait venir du ciel et que j’en fus toute ravie ; au même instant, j’aperçus une nombreuse procession de tous les ordres religieux et ecclésiastiques, c’est-à-dire des prêtres, des évêques, des archevêques, des cardinaux, enfin de tous les ordres.
De ce nombre, deux surtout fixèrent mon attention ; ils avaient l’air tout remplis de l’amour de Dieu. — Il y en avait un dont je ne connaissais pas le costume ; l’autre était à côté de lui dans une posture respectueuse, c’est-à-dire à genoux. Dans ce moment, je vis la colombe, qui était sur la cime de la tige, venir se reposer sur la tête de celui dont le costume m’était inconnu (le Pape), lequel mit la main sur la tête de celui qui était à genoux (le Grand Monarque), et alors la colombe vint aussi se reposer sur la tête de celui-ci, puis retourna sur l’autre ; tout le monde, chacun selon son rang, entourait la personne sacrée du Pontife ; les principaux l’approchaient de plus prêt.
La tige en forme de pyramide, présentait quatre portes principales à ses quatre façades. Le chant continuait toujours ; il s’y mêlait des cris d’allégresse, mais sans confusion ; ils disaient : « Gloire à Dieu dans les cieux, et paix sur la terre ! Vive la religion dans tous les cœurs ! Vive le Pape ! Vive le Grand Monarque, le soutien de la Religion ! »
Ensuite la procession s’avança vers les portes du midi et du couchant, et sortit par les portes du levant et du nord, continuant de faire entendre le chant le plus mélodieux. Dans cette multitude sans nombre, il y avait des personnes de plusieurs royaumes, mais elles n’avaient toutes qu’un cœur, un même esprit et une même volonté.
Pleine d’admiration à ce spectacle ravissant, je m’écriais : « Quand viendront ces heureux jours ? » J’entendis une vois me dire d’un ton plein de bonté : « Console-toi, ils arriveront quand mes volontés seront accomplies ! » Je ne vis plus rien que ma chambre ; il était six heures ».
Le dimanche de la Toussaint, 1816 :
« Dans ce moment, je vis un jeune homme qui me parut avoir environ 33 ans. (le dauphin actuel Hugues Charles Guy de Bourbon vient de fêter ses 34 ans !) Il était d’une beauté ravissante et d’un port qui annonçait quelque chose de grand et de majestueux. En même temps, la voix me dit : « Voilà celui que je garde de tous les périls pour le bonheur de la France. » J’entendis qu’il portait les deux noms de Louis-Charles. Il fut sauvé de la Tour du Temple et conduit en Espagne, et de là en Sicile où il fut enseigné par les Jésuites (sécularisés). En 1801, il rentra en France où il fut arrêté et mis en prison. Il s’en échappa, parce que Dieu le protège et le conserve pour notre bonheur. Il ne rentrera en France qu’après le grand combat. »